Jouy-en-Josas
Vers les années 1950-1953
Mimile La Cloche
C’était
un personnage, étonnant, plein de fantasmes et de gesticulation.
Surtout,
dans ses moments de beuverie.
De lui, on
ne savait rien, peut-être ancien déserteur d’une ou deux guerres.
Son logis,
une cabane non loin du Bois Chauveau où nous traînions quelquefois
et non loin du cimetière où nous allions récupérer, sur un amas
de décombres funéraires, des morceaux de croix perlée pour enfiler
colliers et colifichets.
Pour lui et
pour les nombreux clochards ou vagabonds et errants qui passaient par
cette maison de Jouy – et qui ne manquaient pas de recevoir, de nos
parents, un copieux «sandwich» -un vrai casse-croûte de pain, de
pâté et de fromage, nous avons appris la compassion et le partage.
Après sa
désertion de Jouy-en-Josas, vers la Gare de Versailles-Chantiers,
dans un espace délabré, gîte de fortune, il faisait flotter le
drapeau français, au bout d’un bras encore gaillard.
Le chemineau - Jules Adler |
N’avons-nous
pas, aussi, ramassé les mégots de rue que nous épluchions pour en
faire des petites boîtes de tabac à rouler et acheté, chez
Monsieur BIEBER, rue Oberkampf, du papier JOB, pour qu’ils puissent
rouler leurs cigarettes et volé quelques allumettes à gratter
partout dans leur paquet de papier kraft ?
En même
temps, ils nous apeuraient et ils nous attiraient – ces chemineaux
sortis d’une guerre sans issue – la leur et celle des autres
avec la distribution des bons d’achats – dits tickets de
rationnement.
Les chemineaux - Camille Pissarro |